Découvertes

Dans les arcanes du « Musée de l’esclavage » de Bamendjinda

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Ce temple de la culture situé est situé dans le département des Bamboutos. Il a été (re)inauguré le 12 décembre 2009. Implanté au cœur de la chefferie Bamendjinda, ce musée présente l’histoire de la traite négrière locale.

 

1-    Un musée « new generation »

Le village fait partie des 16 groupements du département des Bamboutos. Lequel se trouve dans la région de l’Ouest Cameroun. Il est situé à 4 kilomètres de la ville de Mbouda dont-il dépend. Il est géré par Sa majesté Jean Marie Tanefo, chef de village. Ce dernier occupe ce fauteuil depuis le 21 septembre 1975. En remplacement de son père décédé en juin 1965 alors qu’il n’a que 10 ans. Jugé trop jeune pour hériter de son père, il est conduit à la chefferie Baleng dans le département de la Mifi pour recevoir, pendant 10 ans, une éducation et une formation sur le plan traditionnelle. Après cette initiative, il retourne et entreprend le développement de son village. Bénéficiant du soutien des personnes de bonne volonté du terroir, il construit entre autres des dispensaires, des écoles et un musée réservé à la conservation, l’interprétation et la valorisation des objets majeurs du patrimoine artistique et culturel du village Bamendjinda qui signifie « Peuple des rusés ».

Nous avons décidé d’aller à la rencontre de ce musée baptisé le « Musée de l’esclavage ». Il est 15 heures. Le car dans lequel nous sommes installés stationne dans la grande cour externe de la chefferie de Bamendjinda. Devant le musée. La délégation est accueillie par Manga Katy Carole, la 11efemme du chef et par ailleurs assistance de Raoul Nzegnou Tanedzeu, le conservateur dudit Musée, absent pour quelques minutes. Elle travaille ici depuis une bonne période. Parce que « le musée se trouve dans la chefferie. C’est le chef en personne qui m’a ordonné d’exercer ici. Quand il refuse que je vienne au musée, je reste auprès de lui ». Eclairage apporté par Katy carole Manga afin de lever certaines équivoques. Le musée qui fonctionne depuis fort longtemps a été réaménagé. Et son inauguration a eu lieu le 12 décembre 2010 par sa majesté Jean Marie Tanefo, 15e chef de cette tribu. Depuis lors, il est devenu un site touristique qui reçoit de nombreux visiteurs. Parmi lesquels des touristes étrangers.

2-    Visite guidée dans les couloirs de l’esclavage

 

Raoul Nzegnou Tanedzeu, le conservateur du musée, est (enfin) arrivée. La visite du musée peut alors débuter sous sa direction. A l’ouverture de la porte centrale, la boutique du musée se présente à vous. C’est la première toute première salle qui sert aussi de secrétariat. Le visiteur peut s’acheter une chéchia, une canne faite à base du bois local, une chaussure en caoutchouc (les premières paires de chaussure fabriquées localement) et des livres sur l’histoire du village Bamendjinda. Le tout à des prix (vraiment) dérisoires. Place au couloir que l’on peut appeler « salle des statuettes ». On trouve ici des statuettes de quelques chefs ayant régnés sur ce peuple. Il s’agit entre autres de fo’o Nzonteu (1839-1870), fo’o Tchioffo (1907-1944) et celle de la reine-mère Mama Kueta.

« Espace colon ». Ainsi est appelé le 3e couloir que nous longions. Il est réservé à l’histoire de la chefferie depuis la fin du XIXe siècle. Cette histoire retracée par écrit est protégée par des vitres et placardée sur les murs. Illustration : « La chefferie de Bamendjinda fut créée à l’issue de longues migrations. Vers le début du 14e siècle, les Nda’a, sous groupe ethnique bamiléké, autochtones du pays Tikar dans l’Adamaoua sont chassés de leur territoire par des troubles de succession et la pression démographique. Désireux de trouver de nouveaux terrains de chasse, ils quittent leur pays d’origine pour s’installer dans le Nord-ouest », lit-on. Ensuite : « Après le Nord-ouest, ils s’installent à Méléfem dans le Noun avant d’être chassé par le Mbouombouo, le 11e roi Bamoun surnommé le conquérant (…) Cinq frères Nda’a se refugient sur l’un des versants du mont Bamboutos et se partagent les terres. Et le site de l’actuel village Bamendjinda[Mba’adoh, 1er appellation dudit village, Ndlr] est confié au cadet, le chef Mbougonog Mba’adoh ». Le reste de cette évolution… au musée.

La visite de cet espace colon se termine par la découverte d’un tambour femelle Ma’nkat, une calebasse, un masque batcham et le chapeau d’un colon exposé sur une étagère. « Ce chapeau aurait appartenu à un allemand linché par les bamendjinda après l’exécution du fo’o Talla », commente sa majesté Jean Marie Tanefo. Raoul Nzegnou Tanedzeu de dire que la particularité du « masque Batcham » est qu’il sort du musée uniquement en cas de décès du chef. Pour qu’il sorte, « les notables doivent prier pendant trois jours et immoler des boucs », ajoute-t-il.

3-    L’esclavage coutumier chez les « Grassfields »

C’est la dernière ligne droite de la visite du musée. Elle présente d’abord l’esclavage coutumier dans la région des Grassfields. Ensuite, ce qu’il appelle l’héritage et réconciliation. On apprend ici que la plupart des esclaves dans cette région s’achetaient au marché. D’autres s’obtenaient à la suite d’un rite. Par exemple, « en cas de litige foncier, on possédait au rite de percer la langue. Celui qui ressentait la douleur était considéré comme fautif. D’office, il devenait esclave », raconte Raoul Nzegnou Tanedzeu.

Dans ce couloir de sortie, sont disposés sur des étagères, des entraves de chevilles, de pieds et de poignets pour enchaîner les esclaves. Ainsi que des exemples de pièces de monnaies destinées à l’achat des esclaves. Les dernières pièces ici datent de 1913. Elles ont été utilisées par l’African West compagny. Sur d’autres affiches, on peut apercevoir les photos des descendants d’esclaves vivant encore au village. Au bout du couloir sont dévoilées les photos des fils d’esclaves devenus célèbres : harriet Tubman, Aimé Césaire, joséphine Baker, Jesse Owwen, René Harran, Frantz Fanon, Malcom X, Toni Morrisson, la 1erefemme noire à obtenir le prix nobel de la littérature, Frédérick Douglas, Le Chevalier de saint Georges et Jean Baptiste du Sable. Des noms qui ont fait et continueront à faire honneur à la race noire.

Frank William BATCHOU

A Bamendjinda dans les Bamboutos

 

frankwilliam

Frank William Batchou est un journaliste de formation. Après avoir exercé dans plusieurs médias camerounais (Le Messager, Emergence, Show Mag, Crtv Littoral, Site-Dar Fm…), il s’est très vite reconverti, au vu de l’évolution, dans le blogging et du digital depuis 2008. Il a géré la communication du projet #Wikivillages de Wikipédia, la communication digitale du programme TV « Yellow Times » de MTN Cameroon, le label de production et management LMC Prod, le social media du magazine culturel Show Mag. Entre 2016 et 2021, il a été Social Media Manager puis Digital Manager chez HAVAS AFRICA CAMEROUN, la filiale du groupe HAVAS Media, l’une des quatre plus grandes agences de communication dans le monde. Depuis juin 2021, il est Community Manager chez Bolloré Transport & Logistics région golfe de Guinée (Cameroun - Tchad - RCA & Guinée Equatoriale). Frank William est également auteur du recueil de nouvelles "MAPANES (L’âme d’un aventurier)" (2018) et du roman "L'erreur de la nuit" (2021). Frank William Batchou est également le Founder & Excutive Groups Manager de F Square Corporation, une structure exerce dans le secteur de la Communication digitale, le management, édition et production artistique, promotion sportive, la mode… Plus d'infos sur https://fsquarecorporation.com

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