Avec « calebasse vide », son dernier album, l’artiste exprime avec une dense poésie, son ambition pour la renaissance culturelle africaine.
Il est mâtiné d’une poésie assumée. Il est conçu pour exprimer la philosophie – comme d’aucuns diraient vision – de l’artiste sur son monde, son art et la place qu’elle occupe ou occupera dans notre environnement. Avec une métaphore de la calebasse dont la profondeur et la polysémie pourraient dérouter plus d’un… On l’aura compris, Gaby Fopa, plus de dix ans après « Solitude » n’est pas simplement revenu avec un album. Mais bien plus que ça, le disque est tout un concept sur la prise de conscience de l’Homme africain. On ne s’en plaindra pas.
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Ce 5e disque est l’illustration d’une prise de parole dans un espace public potéiforme et plein d’enjeux. Et il a apparemment beaucoup à dire, mais surtout à chanter. Et pour son « hyperalbum », l’artiste-informaticien n’a pas économisé les moyens, en servant des morceaux d’une égale profondeur. De l’orchestration jusqu’aux thèmes abordés, en passant par la participation des grosses légumes (Jack Djeyim, Richard Epesse, Justin Bowen, Bobby Nguime James…), et de jeunes pousses prometteuses (Gaëlle Wondje, Bibiane Sadey…), le tout arrangé par un Manuel Wandji fringant, Fopa a commis du lourd.
Un condensé de création artistique
L’auteur de « Illusion » redonne ses lettres de noblesse à la chanson à textes : alternance de guitares acoustiques et électriques, rimes riches, diversité instrumentale, chœurs forts, jetés comme des cauris sur de la soie. Sans parler de son lead vocal que rehausse sa langue issue des Bamboutos, et son agencement réussi aux airs traditionnels. Quand Cabrel rencontre André-Marie Tala…
« Calebasse vide » est donc la parfaite jonction entre les atouts traditionnels de ces hautes terres de l’Ouest d’où s’échappe une fine poésie paysanne, et de la sincère modernité d’un homme de notre temps, qui a ouvert les yeux depuis fort longtemps. Le tout donne une symphonie unique en ce 21e siècle où l’Afrique cherche ses marques. Son discours philosophique et sa démarche artistique sont autant d’heureuses pistes déblayées pour l’avenir. Car « Calebasse vide » est bien une métaphore de la purification pour un (re)commencement créatif et actif en Afrique, qui pour l’artiste, dévoile les clés « de la véritable tolérance, de la paix, de l’amour et du vivre ensemble ; valeurs que nous espérons et invoquons comme socle, l’essence d’une mondialisation durable, juste, équilibrée et ensoleillée ».
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Gaby Fopa, en idéaliste qui se respecte, voit grand, ne fait rien comme personne : la pochette est un condensé de création artistique dans lequel des plasticiens (Jean Emati et Sebastiene) viennent colorer ce récital qui donne du baume au cœur, égaye l’esprit (tel ce bleu ciel omniprésent) et permet de rêver d’un futur encore plus radieux. Partir de l’abstrait pour mieux expliquer le concret. Si l’espoir a un visage, Gaby Fopa lui donne un rythme. Il est contenu dans cette calebasse vide qui se remplit de sons, d’où jaillit l’espoir d’un renouveau tant attendu.
AT