Si à travers les arts plastiques, l’on parle des regroupements de toutes les pratiques ou activités donnant une représentation artistique, esthétique ou poétique au travers des formes, des volumes et des profondeurs, il faut reconnaître que les arts plastiques au Cameroun, un peu plus que toutes les autres formes expressions artistiques sortent de loin. Considérés dans sa perception culturelle locale comme une exception ou un art élitiste fait pour une caste nantie et privilégiée de la société. Même les milieux religieux et l’environnement de nos us et coutumes ou des masques, des sculptures ou autres tableaux longtemps entretenus et parfois soigneusement gardés par nos ancêtres demeurent mythe pour la plupart d’entre nous et relève de l’art rituel parfois pas accessible par beaucoup. Il faut donc reconnaître que les créations dans ce domaine tout comme leurs auteurs si nous ne pouvons pas les considérer comme des révolutionnaires, acceptons tout de même qu’ils sortent de très loin.
il faut reconnaître que les arts plastiques au Cameroun, un peu plus que toutes les autres formes expressions artistiques sortent de loin
Pour planter le décor à côté de ce parfait étranger que nous côtoyons au quotidien et que nous considérons sans cesse comme n’étant bon que pour l’autre. Permettez-moi de vous raviver la mémoire avec un fait inédit qui traduirait chez chacun de nous un sentiment à interprétations diverses. Mais qui laisse entrevoir la brimade ou la prison, si ce n’est le climat et l’univers dans lesquels évolue l’art plastique, les œuvres et leurs auteurs au Cameroun : qui ne se rappelle pas de ce crime culturel crapuleux, barbare, cruel, bestial et même pourquoi avoir peur des mots inhumain donc fut victime le 29 mai 2015, l’exposition « King of Shadow » de l’artiste Samuel Dalle menée par la jeune Galérie Akok MBELLA chez une des galeries doyennes de la place ? Sans vouloir incriminer qui que ce soit j’expose ici un des tableaux sur lequel l’on peut lire ou observer le chemin des artistes plasticiens camerounais et les rapports avec les galléries depuis le début de cet art proprement dit au Cameroun et qui fut promu par les doyens comme Koko Komengne à la veille des indépendances.
Qui ne se rappelle pas de ce crime culturel crapuleux, barbare, cruel, bestial et même pourquoi avoir peur des mots inhumain donc fut victime le 29 mai 2015, l’exposition « King of Shadow » de l’artiste Samuel Dalle menée par la jeune Galérie Akok MBELLA chez une des galeries doyennes de la place ?
Depuis lors L’univers des arts plastiques s’est bien enrichi et est devenu extrêmement bouillonnant de créativité et de pratique qui déteignent sur les autres formes d’expression artistique et ce, depuis la nuit des temps. En Occident on a épuisé styles et mouvements en tout genre en plus de cinq cents ans. Tandis qu’en Afrique et singulièrement au Cameroun, on essaye de se caser quelque part dans ce fouillis de valeurs. C’est qu’ici, on découvre la peinture sur chevalets, on se l’approprie et on devient des As de la chose. On peut tutoyer ceux de l’autre côté, si ce n’est qu’on se laisse façonner, mouler par eux, pour avoir une chance d’exister au milieu, d’occuper la petite place qu’ils veulent bien nous concéder. Pour le moins c’est plus qu’une perception, eu égard aux exigences et critères de sélection pratiqués par des institutions qui ont pignon sur rue dans notre contexte et qui se donnent la charge d’accompagner des créateurs.
L’univers des arts plastiques s’est bien enrichi et est devenu extrêmement bouillonnant de créativité
Il s’agit bien sûr de galerie. Or, à l’évidence la scène artistique camerounaise en est si peu pourvue, que l’offre créative est exponentielle. Conséquence, très peu d’artistes jouissent du privilège de figurer dans le catalogue des espaces d’arts contemporains disponible. L’immense majorité d’entre eux doivent se débrouiller comme ils peuvent pour exister, exprimer leur talent et l’exposer. S’il y a si peu d’élus pour le ciel, il y a donc lieu de s’interroger sur les choix de ces institutions. De se demander si les créations des artistes peintres sont compatibles avec les standards prônés par ces galeristes. Quels sont les cahiers de charges qui justifient le choix de tel plutôt que de tel autres ? Les frustrations que cette situation engendre se justifie-t-elle ? Quelles peuvent être les solutions pour booster la production artistique et sa consommation tant à l’intérieur du pays qu’à des échelons internationaux ?
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Avant d’aller conquérir le monde, ne faut-il pas commencer par conquérir des cœurs plus proches de soi ?
C’est dire toute l’importance de développer un marché de l’art dynamique ici et maintenant, en vue de permettre à ce trop-plein de création artistique de circuler, d’abord bien plus au plan intérieur que celui international. C’est ce à quoi des initiatives comme Vision Art Expo ambitionnent d’apporter une réponse et contribution significative. D’autres initiatives se bousculent dans le paysage des arts visuels au Cameroun (RAVY, les expos Futur’Art, Douala’Art Fair, Barbecue’ Exposition, des expositions individuelles d’artistes dans des espaces délirants). Avec plus ou moins de retentissement. Le moins que l’on puisse dire est : N’est-il pas temps de bousculer des habitudes devenues obsolètes ou qui pêchent par leur inefficacité à essaimer cette pléiade de talents dans l’appropriation des citoyens Camerounais de ce riche patrimoine artistique qui se construit sous leurs yeux ? Avant d’aller conquérir le monde, ne faut-il pas commencer par conquérir des cœurs plus proches de soi? Telle est la mission que nous pouvons attendre de toute institution qui veut promouvoir la création artistique contemporaine que des créateurs de génie construisent inlassablement. Allons-y donc voir ça de plus près.
Sylva Ebelle
Chronique diffusée sur RSI (92.3Mhz) dans l’émission Ebelle’Scopie du 04/08/2018